03 septembre 2005

A cause d'un garçon

Semaine du coming-outC'est bientôt la rentrée universitaire, des néo-pédérennais vont investir les rues Saint-Malo et Vasselot, et augmenter l'offre et la demande de plans cul et de princes charmants en tous genres. Les célibataires de la saison 2004-2005 trouveront peut-être quelqu'un à présenter à leur maman. Sauf si la sortie du placard n'a pas été faite, ou s'est mal passée. Le Monde de Katia, toujours plus proche de ses lecteurs, célèbre ainsi la Semaine du Coming-Out, à travers une série de petits articles mal écrits...

Pour commencer, Katia a bien envie de vous parler de son propre coming-out. Ca remonte à tellement longtemps, et elle était tellement jeune - 13 ans - qu'elle ne s'en souvient presque plus. C'était dans une petite ville très calme, qui n'a fait la une de la presse qu'à une seule reprise : quand un mec est resté une nuit entière le doigt coincé dans le distributeur de capotes sur le parking du supermarché ; c'était même passé au journal télé ! Dans cette ville, la mentalité était plutôt tendance gros ploucs pleins de fric mais sans culture, et tout ce qui était un peu original était pointé du doigt.

Très tôt, Katia a cherché à se singulariser. Plutôt que de jouer au foot avec les autres garçons, elle préférait jouer à l'élastique, ou à la corde à sauter. En sixième, elle a bien entendu cherché à se faire dispenser de sport pendant les deux premiers trimestres. Déjà, à 12 ans, elle avait une sacrée réputation. Les choses se sont accentuées en cinquième. A cause de sa prof de maths (qui s'appelait Régine Cochon, ça ne s'invente pas !), une grosse truie qui la prenait pour une p'tite merde, elle a été collée plusieurs fois, uniquement parce qu'elle lui répondait, à cette conne. Y avait de quoi : cette pouffiasse était raciste, elle se foutait de la gueule des Turcs qui étaient dans la classe. Mais l'insolence, c'était pas bien vu, et les autres élèves trouvaient toujours de quoi faire de Katia leur souffre-douleur. Voilà le tableau.

Quelques jours après la rentrée, elle a fait la connaissance de Franz, un petit nouveau. Il était beau, super gentil, très intelligent, blond, les yeux bleus, alors forcément, elle est tombée amoureuse très vite. Et comme Katia ne fait pas les choses à moitié, elle lui a envoyé une lettre d'amour. Le seul problème, c'est que Franz ne savait pas qu'un garçon pouvait tomber amoureux d'un autre garçon, donc il a cru à une blague, et a montré la lettre à tout le collège. Là, Katia s'est payé la méga tehon de sa vie, et tous les élèves étaient surexcités : c'était une grosse pédale, une tarlouze, tout le monde devait le savoir, tout le monde devait se foutre de sa gueule, tout le monde avait le droit de lui sortir les pires insultes, et de lui faire subir les pires humiliations. C'est à partir de ce jour que Katia a appris à manger toute seule au self, à se changer dans un vestiaire à part, à répondre à tous ceux qui lui font une remarque blessante, à se retrouver toute seule dans la cour pendant la récréation, et à ne pas compter sur le sens de la solidarité des autres personnes de son âge... et des adultes. Parce que les profs (excepté Mademoiselle Marie-Louise J, professeuse d'anglais), les surveillants, l'administration du collège, tout le monde trouvait ça marrant : on rigolait aux blagues homophobes, on disait à Katia que c'était de sa faute, qu'elle n'avait pas qu'à être amoureuse d'un garçon, et que c'était débile d'envoyer une lettre d'amour, et qu'elle faisait son intéressante, comme d'habitude.

Heureusement, Katia a une maman encore plus grande gueule qu'elle, et un papa compréhensif et relativement protecteur. Elle a tout raconté à ses parents, qui sont allés faire un scandale dans le bureau du principal. "Notre fils est pédé, et alors ? Votre rôle, c'est d'apprendre la tolérance aux gamins, pas d'être complices du lynchage d'un de vos élèves. Respectez-le, sinon on appelle le Canard Enchaîné, et on balance vos profs racistes".

Voilà, grâce à Franz, Katia a eu un coming-out mouvementé. Il n'a pas eu lieu dans le living-room familial pendant le journal télé de P-pédé-A, mais presque devant une ville entière. La suite est beaucoup moins drôle. Etre pédé dans une petite ville de cons, au début des années quatre-vingt dix, ça signifie être placé aux marges de la société, avec les immigrés et les handicapés. Ca veut dire entendre les messes basses des rombières chez le marchand de journaux quand on va s'acheter Libé, et subir des insultes en traversant la place de l'Hôtel de Ville. A côté de ça, à la maison, il était tout à fait normal de se lever en pleine nuit pour changer de cassette dans le magnétoscope parce que Canal + diffusait la Nuit Gay, d'inviter la "copine" de Tata Dany pour les vacances, ou d'aller voir "Priscilla, folle du désert" en famille au cinéma. Et qu'est devenu Franz ? Un lycéen modèle, qui commençait à se poser des questions à la veille de ses 18 ans. Un soir, pendant une party, il a dit à Katia qu'il aimerait essayer, pour voir. C'est donc devant le parking à vélos du lycée qu'elle lui a roulé la pelle du siècle, tandis qu'il demandait pardon pour tous les tourments que son comportement avait provoqués.

Katia a bien de la chance d'avoir une famille comme ça. Un jour, en discutant avec Yvette, elle a remarqué que les mecs qui sont sortis du placard très tôt, et qui sont soutenus par leur famille, avaient moins tendance que les autres à se tapper des plans cul sans blabla. Au contraire, les planculteurs les plus cyniques sont parfois ceux qui, à 29 ans, n'ont toujours pas dit à leurs amis les plus proches, ou à leur famille, qu'ils préféraient les garçons...

Prochain épisode : Tatie Rose écrit une lettre ouverte à son papa.

Katia,
apprentie-coiffeuse en échec scolaire

6 Commentaires:

le 04 septembre, 2005 00:45, Anonymous Anonyme a dit...

ma chérie, j'ai l'impression en te lisant que beaucoup de pd on vécus la même chose, moi c'était différent je passais mon temps à gueuler et à taper sur tout le monde donc on ne me faisait pas trop chier, et puis vu que j'avais grandi dans le même quartier que les caïds du collége et du lycée, on me foutait la paix.
Cela dit moi aussi je faisais tout pour ne pas aller en sport car ça me saoulé, du coup je séchais les cours d'EPS comme une grosse vache, et à la place j'allais sniffer de l'éther derriére l'établissement!!! c'était le bon temps

 
le 04 septembre, 2005 13:36, Anonymous Anonyme a dit...

Alors, belle Katia, depuis t'en envoies encore, des lettres d'amour comme celle là ? j'imagine que c'est à cause de ça que tu ne sais pas comment le dire... (je n'invente rien, c'est toi qui le dit dans un vieil article !)

Au fait, bon anniversaire ! je dois bien être le seul lecteur à te le souhaiter...

Amitiés,
LCM

 
le 04 septembre, 2005 19:58, Blogger Le Monde de Katia a dit...

Miss Fiotte > Moi aussi, je gueulais, je me rappelle même que j'avais provoqué une grêve à l'école primaire avec manif dans la cour, pour protester contre la méchanceté de la surveillante de la cantine ;-) Et puis je faisais mon intéressante, du genre l'imitation de Stef de Monac devant toute l'école. C'était ma façon à moi de trouver ma place dans cette école de merde. Mais ça ne m'a pas empêché d'être le souffre-douleur de mes "camarades" pendant toute cette période, parce que j'étais un garçon plus "sensible" que les autres...

le commentateur masqué > Merci d'y avoir pensé ! Cela dit, tu n'es pas le seul, j'ai notamment reçu un message très gentil dans ma boite aux lettres... Et pour les lettres d'amour, j'ai effectivement arrêté d'en envoyer. Maintenant, il y a les mails et les textos ;-) Mais tu as raison, j'ai du mal à dire "je t'aime". La dernière fois que j'ai prononcé cette phrase, c'était en juin 1999 !

Bonne soirée,

Katia,
cheffe de gare avec une belle casquette

 
le 04 septembre, 2005 22:19, Blogger Le Monde de Katia a dit...

Le Soldat Inconnu > Ben, en ce qui me concerne, je serais plutôt dans la catégorie "Coming-out précoce, faible planculteur" (disons que j'ai pas besoin de me tapper un mec 3 fois par semaine pour me sentir exister), mais il ne faut pas en déduire que je suis sexophobe (c'est mon ex Francesco qui a inventé ce terme). J'aime la gymnastique sur les matelats en bultex, et sur tout autre revêtement confortable !!! Le problème, c'est de ne pas le faire avec n'importe qui...

Alors, c'est vrai, Fran Qui Sup Air Star n'aime peut-être pas le sexe avec les dames, ni avec les monsieurs. Mais il doit bien aimer le sexe avec lui-même... Ca lui irait parfaitement !!!

Et puis, je ne te crois pas quand tu dis que tu n'as pas de vie sexuelle... J'ai un peu de mal à l'imaginer ;-)

Bisous,

Katia,
qui a renoncé au régime sans selle

 
le 05 septembre, 2005 14:14, Anonymous Anonyme a dit...

moi j'ai mis du temps et ça s'est plus que bien passé, c triste meme car je n'ai meme pas d'anecdote genre "le jour où mon meilleur pote m'a humilié dans la cour" du coup lol enfin j'avoue que c peut etre mieux comme ça quand même
et pour les théories de math... euh c peut etre vrai (mais je ne préciserais pas à quel age je suis sorti du placard meme si c bien connu c bien tommy

 
le 05 septembre, 2005 16:33, Blogger Le Monde de Katia a dit...

Galou > Je ne juge pas, mais c'est effectivement un simple constat empirique que j'ai fait : les mecs sortis du placard assez, voire très tôt, ont tendance à préférer les histoires longues et sérieuses aux plans cul à répétition. Mais c'est comme en sciences sociales, il s'agit d'un modèle, et dans la réalité c'est pas pareil ;-)

Sinon, ton coming-out a peut-être été plus calme que le mien, mais si c'était à refaire, je préfèrerais me taire au collège, parce que finalement, ces cons-là n'avaient pas besoin de savoir que j'étais pédé. J'ai toujours été victime de ma naïveté, à 13 ans comme à 27...

Bisous,

Katia

 

Enregistrer un commentaire

<< Accueil